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Ich bin ein LGBTQIAP

  18 Sep , 2019   , ,    COJ

Alter Visio, une organisation de jeunesse LGBTQI+ qui a récemment intégré la COJ nous passe en revue les fameux sigles LGBTQI+… que l'on connait sans connaitre. Les sigles d'une époque où l'émancipation sexuelle et de genre est en marche, non sans difficultés.

LGB, LGBT, LGBTQ, LGBTQI, LGBTQIA, LGBTQIAP… Quand cela s’arrêtera-t-il ? Jusqu’où aller ? Comment s’y retrouver ? Pour dire quoi ? Ces questions, non-exhaustives et légitimes, mènent finalement toutes à la même réponse : dans nos sociétés qui prennent de plus en plus conscience de la complexité de ce qui les construit, les individus éprouvent le besoin d’être reconnus à différents niveaux de leur identité. Des identités plurielles.

Il ne s’agit pas d’un besoin d’identification narcissique, mais du besoin de pouvoir vivre et être en tant que tel au sein de la Cité. De ne pas (plus) avoir cette crainte permanente de vivre la stigmatisation, le rejet, l’abandon. De pouvoir être identifié avec ses réalités dans une perspective réelle d’égalité des chances. Et donc cet acronyme LGBT (et ses diverses variantes) vient éclairer cette complexité et ce besoin d’identification.

Associé au mouvement dit « homosexuel », l’acronyme LGBT met en exergue, dans l’histoire de ce mouvement, la pluralité des individus qui le compose. Souvent visibilisé dans son pan masculin, celui-ci donnait trop peu, pour ne pas dire pas, d’espace au champ dit féminin. De la même manière, cette division bisexuée de la « communauté » n’apportait pas de visibilité à celles et ceux qui ne s’inscrivaient pas dans l’une ou l’autre case, mais qui venaient identifier un autre pan de l’attirance affective et sexuelle, la bisexualité.

Le Rainbow flag, ou drapeau arc-en-ciel, est le symbôle de la communauté LGBT+. Et bien que chaque groupe constituant la communauté a créé son propre drapeau, le drapeau arc-en-ciel mis en avant par Gilbert Baker lors de la Pride de San Francisco (1978) est devenu le symbole de l’ensemble de la communauté. Ce drapeau est également utilisé par d’autres cultures ou d’autres mouvements s’engageant pour la paix, la diversité….

Au fil du temps, les réalités de différents groupes viennent étoffer la communauté et l’acronyme s’accroche de nouvelles lettres : « T », « Q », « I », …  Bien que le socle commun (ne pas correspondre au modèle hétéronormé) est assez large, chacun.e vit des réalités propres qui se doivent d’être prises en compte afin de permettre à tou.te.s un accès à des droits identiques, à une reconnaissance sociale et institutionnelle. Exemple : le mariage, la parentalité, etc.

LGBTQIAP : décodage

Petit rappel de derrière la lettre. 

L = lesbienne : femmes ayant une attirance affective et physique pour d’autres femmes .

G = gay :hommes ayant une attirance affective et physique pour d’autres hommes.

B = bisexuel.le : individus ayant une attirance affective et physique tant pour les femmes que pour les hommes.

T = trans :  individus nés biologiquement homme ou femme et qui ne se reconnaissent pas dans le genre biologique attribué. Si l’on entend encore souvent la dénomination « transexuel.le », celle-ci tend à être évitée en ce qu’elle implique un aspect médicalisé, soit une opération des organes génitaux menant à un « changement de sexe ». Or tous les individus se définissant comme trans, ne visent pas de suivi médical ou d’opération, chacun.e vivant son propre parcours de transition (de l’apparence physique, aux tenues vestimentaires, en passant par la prise d’hormones ou encore pour certain.e.s par une opération). à celui-ci, on préfèrera utiliser la dénomination transgenre, voire transidentitaire qui se veut plus fluide et plus inclusif. Plus communément, c’est le terme « trans » qui sera exprimé.

Q = queer : certains individus refusent toute identification en regard de l’orientation sexuelle et/ou de l’identité de genre, tout en refusant l’hétérocentrisme ambiant de la société. Au-delà, le mouvement queer s’est développé sous forme d’un vaste champ culturel allant de la littérature au cinéma en passant par la musique, la danse, les arts plastiques…

I= intersexe : individus qui portent à leur naissance les organes génitaux des deux sexes, de façon plus ou moins développés. La prise en compte et l’étude des spécificités de ces individus est assez récente. On considère aujourd’hui qu’environ 0,3% de la population serait identifié comme tel à la naissance. Il est à noter que pour certain.e.s, cette réalité n’est pas visible dès la naissance, mais apparaîtra plus tard dans leur développement.

A = asexuel : individus ne ressentant pas d’attirance sexuelle.

P= pansexuel : individus ayant une attirance affective et sexuelle peu importe le genre et le sexe d’un autre individu.

D’autres lettres viennent régulièrement s’associer à l’acronyme et dans certaines régions d’autres types d’acronymes coexistent. Mais par convenance et par soucis de compréhension, c’est celui-ci (LGBT) qui sera le plus véhiculé. Actuellement, afin d’éviter l’oubli ou le manque de reconnaissance de certain.e.s, il apparaitra associé à un « + » : LGBT+ voire LGBTQI+.

Le combat des identités libres 

De tout évidence, l’histoire mouvante de ces lettres vient évoquer que l’humanité, tout comme le monde animal, n’est en rien inscrite dans une dynamique hétérocentrée. Il n’est plus à « démontrer » que les pratiques sexuelles autres qu’hétérosexuelles sont bien présentes au sein de l’espèce humaine. De la même manière, nous retrouvons des pratiques dites homosexuelles au sein du monde animal. S’il est souvent fait écho de couples de manchots homosexuels, nous retrouvons trace de pratiques homosexuelles auprès de plus de 400 espèces animales.

La « Pride », aussi appelée « Gay Pride », ou « Lesbian and Gay Pride », naît à la suite des émeutes de Stonewall en 1969 à New-York. Cette marche qui se voulait être la commémoration de ces évènements tragiques est devenue au fil des années une manière d’apporter une visibilité à la communauté LGBT+.  à Bruxelles la première « Gay Pride » se déroule en 1995. L’évènement n’a cessé d’évoluer, pour finir par s’appeler « Belgian Pride », soit un évènement pour tou.te.s, un évènement qui se veut être un éclairage de la diversité.

Pour ce qui est des individus, au-delà de la sexualité, la problématique s’inscrit à d’autres niveaux de leur vie et ce dès le plus jeune âge. Pouvoir dire, afficher et vivre son orientation sexuelle reste, même en Belgique, particulièrement difficile. Les questions de sexualité et d’identité sont bien plus complexes et mouvantes. Elles ne se limitent pas à hétéro, homo, ou bi. Elles sont partie intégrante des individus, auxquels il appartient de se définir s’ils le souhaitent. 

Si la Belgique a pu, depuis la fin des années 90, penser un cadre légal particulièrement inclusif en regard de la communauté LGB1 et plus récemment pour les trans2, c’est grâce au travail de sensibilisation d’une communauté qui a pu prendre en considération la pluralité de ses composantes.

Aujourd’hui, ce travail de sensibilisation doit dépasser la simple communauté LGBTQ+… et s’intégrer dans les pans de la société, de l’éducation, de l’espace public, des médias, de la culture en apportant des référents positifs, des outils plus inclusifs permettant à tou.te.s de se reconnaître dans les représentations diffusées. Parce que, in fine, chaque semaine a son fait divers de harcèlement, de violence, de tabassage sur l’Autre différent de soi, sur un couple d’homosexuels, sur un individu transgenre, ni femme, ni homme…  C’est aussi oublier, que sous les paillettes et les chars joyeux, les « Gay Pride » de la communauté LGBTQI+ passent difficilement à travers l’espace public comme en Russie ou en Turquie.

Plus près de nous, le secteur jeunesse se devra(it) d’apporter à tou.te.s les jeunes les ressources nécessaires afin que les jeunes puissent se construire dans des espaces sécurisés, sains et ouverts prenant en considération la pluralité des identités de chacun.e, en ce compris l’orientation sexuelle et  l’identité de genre.  Est-ce toujours le cas ?

De plus, aujourd’hui la communauté LGBT+ se trouve face à un nouveau tournant de son histoire. Elle découvre qu’elle est métissée, colorée et composée d’individus aux origines vastes et variées. Une jeune femme originaire du Maghreb et se définissant comme lesbienne sera confrontée à une multitude de barrières l’empêchant de vivre sereinement, sa vie affective et sexuelle.

Si la lutte pour les droits acquis doit se poursuivre, cette lutte doit s’élargir afin de prendre en considération un ensemble de paramètres qui ne se limitent plus à  la question de l’attirance physique et sexuelle, mais qui vient intégrer les notions de genres, d’origines, de cultures. Ce n’est qu’en prenant en considération l’ensemble de ces éléments que le combat de la communauté LGBT+ pourra se poursuivre et être digne de ce qu’il a toujours été, un mouvement pluriel capable de se remettre en question, un mouvement représentatif de tou.te.s les individus. 

Bernard Guillemin, coordinateur à Alter Visio – www.alter-visio.be

Pour aller plus loin…

  • A lire :  Alison Bechdel, Fun Home, Points, 2014
    Edouard Louis, En finir avec Eddy Bellegueule, Seuil, 2014
  • A écouter : Une histoire des homosexualités (4 épisodes), émission radio La Fabrique de l’histoire sur France Culture. 
  • A voir : Prayers for Bobby, de Russell Mulcahy, 2009

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1.  Loi pour la cohabitation légale – 1998, loi pour le mariage entre personnes de même sexe – 2003, adoption par les couples de même sexe – 2006, …

2.  Loi dite trans, facilitant la transition administrative (changement de dénomination, de sexe…pour les trans. Cette loi qui date de 2017 a néanmoins fait l’objet d’une condamnation en 2018 par la cour constitutionnelle qui oblige le législateur a adapté davantage sa loi.