Un chien à faire garder ? un article à traduire ? une chambre à louer lors d’un city trip ? un trajet en voiture après un concert au sportpaleis ? besoin d’un prêt financier ? DogVacay, Taskrabbit, airbnb, uber et Lending club n’attendent que vous ! Cette « sharing economy » est-elle vraiment « de partage » ?
Si l’application Couchsurfing permet de mettre sa chambre d’ami à disposition gratuitement, Airbnb propose à des propriétaires de louer, avec contrepartie financière, une pièce de leur habitation ou un appartement inoccupé. Dans ce second exemple, il ne s’agit pas d’un partage désintéressé entre particuliers mais d’un réel marché locatif à court terme. L’échange, la communauté et l’amitié laissent place à l’efficacité, la fiabilité et le prix1. Il n’y a, en effet, aucune raison pour qu’une discussion avec un conducteur d’Uber soit moins riche humainement qu’avec un taximan. Uber : « better, faster, cheaper than a taxi », le slogan a le mérite de l’honnêteté.
Ces plateformes commerciales de services modifient la société du travail en proposant des jobs temporaires « à la demande », sans sécurité sociale. Une simple désactivation en guise de rupture de collaboration. Pas de congés payés ni de protection en cas d’incapacité de travail. Dans un évident vide juridique, elles sont en train de créer une multitude de nouveaux indépendants, forcés de l’être, dans une certaine précarité. Taskrabbit qui souhaite étendre ce mode de travail à l’ensemble du secteur tertiaire, pourrait déstructurer notre économie de service. Les conseillers juridiques ou comptables, les jardiniers, les journalistes, les traducteurs ou les aides-ménagers verraient, en partie, leur emploi sacrifié au profit d’applications qui proposent les mêmes services entre particuliers à des prix moindres.
En juin dernier, la FGTB a déposé plainte contre Uber au motif qu’il aurait recours à de faux-indépendants. Selon le syndicat, il s’agirait, en réalité, d’employés à l’inverse de ce qu’a récemment déclaré l’ONSS. La décision de justice qui tranchera ce différend permettra de mieux connaitre les droits attachés aux utilisateurs de ces applications dites collaboratives. En Californie, un juge a estimé qu’en imposant les tarifs et en sanctionnant les chauffeurs qui refusaient des courses, la société de transport se comportait en employeur.
L’évitement de l’impôt et la déconstruction du droit du travail sont deux critiques souvent faites à ces nouvelles applications, elles comportent cependant au moins un avantage. D’un point de vue environnemental, elles permettent une diminution de production de biens. Le CEO de Uber estime, par exemple, pouvoir retirer près de 400 000 voitures en un an des routes européennes si son application peut s’étendre sur ce territoire2.
D’autres initiatives de partage et de solidarité existent. Le réseau des consommateurs responsables (RCR) a recensé sur des cartes géographiques3 une série d’alternatives basées sur l’échange ou la gratuité. Les donneries, systèmes d’échange locaux, potagers collectifs et GAC ne sont qu’à un pas de chez vous et créent du lien social.
Si un cadre juridique clair est nécessaire pour réguler le fonctionnement de ces sociétés marchandes, il ne faudrait pas que des règles juridiques trop rigides ne restreignent le développement d’autres dynamiques fondées sur le partage non lucratif4.
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1. Edgar Szoc, Du partage à l’enchère : les infortunes de la ‘Sharing Economy’, avril 2015, www.acjj.be.
4. Maxime Lambrecht, Sharing ou Renting economu, La Libre Entreprise, 2 mai 2015, www.uclouvain.be.