Au niveau fédéral, un avant-projet de loi prévoit l'instauration d'un nouveau statut qui n'est ni du volontariat, ni du travail salarié classique. Ce nouveau statut, présenté comme une avancée, pourrait provoquer quelques dérégulations dans le secteur associatif.
L’objectif du statut semi-agoral, également appelé « travail associatif », est de permettre à certaines personnes d’avoir, par an, une indemnité de 6.000 euros de revenus complémentaires exonérés d’impôt. Les différentes activités qui pourront être exercées dans le cadre de ce travail associatif seront listées dans un arrêté royal. De manière générale, il s’agira d’une forme de travail réalisé dans le secteur non marchand et effectué dans l’intérêt de la collectivité ou d’autrui.
Ce statut qui n’est pas encore adopté mais qui devrait entrer en vigueur en janvier 2018 fait actuellement l’objet de discussions au sein du secteur associatif. L’avant-projet de loi est actuellement soumis pour avis à différentes instances. Pour les entreprises à profit social belges, le représentant est l’Unisoc. Le Conseil National du travail a, quant à lui, déjà remis un avis négatif1. Les points d’accroche sont variés et portent notamment sur l’ouverture du statut, la forme de l’indemnité et l’influence sur l’emploi.
Dans l’avant-projet de loi, cette nouvelle indemnité de 6.000 euros ne pourra être touchée que par une personne pensionnée, indépendante ou salariée dont le taux d’occupation est d’au moins 4/5ème temps. Les étudiants, les chômeurs sont exclus de ce statut ainsi que les salariés dont le taux d’occupation est inférieur à 4/5ème temps. Cette exonération d’impôt sur 6.000 euros de revenus complémentaires discrimine une série de personnes pouvant se trouver dans une situation plus précaire.
En ce qui concerne le paiement, il ne s’agit pas d’un défraiement comme c’est le cas pour les volontaires ni d’une rémunération salariale. Le texte prévoit une indemnité maximale de 6.000 euros par an et d’une limitation mensuelle pouvant aller jusqu’à 1.000 euros. Cependant, l’avant-projet de loi ne prévoit aucune relation entre la prestation et l’indemnité. Cela signifie qu’une ASBL pourrait engager les services d’un formateur pour une demi-heure en lui offrant une indemnité de 500 euros. Est-il normal que des indemnités exonérées d’impôt soient versées sans lien avec une activité exercée ? Si ces indemnités sont « offertes » grâce à des subventions publiques, ce système semble particulièrement contraire à l’éthique.
En outre, ces activités sous statuts semi-agoral pourraient remplacer des emplois stables. Or, le statut semi-agoral ne comprend pas les mêmes garanties ni les mêmes protections sociales (licenciement, cotisation pour la pension…). Un autre risque est d’avoir une baisse de la professionnalisation du secteur puisque aucune exigence de qualification n’est prévue par ces nouveaux « travailleurs associatifs ».
Malgré ces désavantages importants, ce système pourrait permettre aux employeurs de bénéficier d’une certaine flexibilité et de trouver plus rapidement « des travailleurs associatifs » pour exercer certaines activités ponctuelles et occasionnelles qui ne sont pas des emplois vacants. Cette mesure pourrait, par exemple, faciliter le recrutement d’arbitres ou d’entraineurs qui demandent un engagement plus important que le volontariat sans pour autant pouvoir prétendre à un contrat de travail.
En l’état, cet avantage ne permet pas de compenser les dérives que cette mesure pourrait engendrer. Des aménagements devraient être réalisés afin d’empêcher toutes discriminations entre différentes catégories de citoyens et afin de veiller tant à la bonne gouvernance des ASBL qu’à leur professionnalisation.
Elodie Hemberg, juriste de la COJ