La génération climat resplendit dans les médias par son réformisme et sa facilité à être récupérée...
Organisations, entreprises, partis politiques, etc. ont pu profiter des marches étudiantes pour le climat pour se faire un bon petit coup de pub en redorant leur couverture hypocrite d’écolo. Comme l’a fait par exemple le recteur de l’UCL en se montrant à une des marches ayant lieu à Louvain-la-Neuve, quel paradoxe quand on sait que l’UCL est à la base du projet de l’Esplanade, le gros centre commercial de L-L-N. Ou aussi Raoul Hedebouw, se montrant sur son petit podium à la fin d’une marche à Bruxelles…
Selon moi, cette facilité à être récupéré est due au fait que les marches pour le climat sont restées pacifistes, ordonnées, et réformistes. Des petits blancs qui respectent le parcours tracé par la police, qui ont peur de parler d’anticapitalisme, trouvant que leurs propres ambitions sont plus hautes, celles d’instaurer la justice climatique dans le système existant ! Pour la Belgique, l’exemple est la loi climat… tombée à l’eau.
Vu le peu de controverses qu’elles suscitaient, n’importe qui y trouvant de l’intérêt pouvait utiliser les marches étudiantes pour le climat pour se mettre en valeur. La génération climat n’est pas une jeunesse rebelle mais bien une jeunesse réformiste qui ne représente pas de danger pour la stabilité des pouvoirs.
Si au 19ème siècle, l’anarchisme était à son apogée dans les mouvements sociaux, il n’a pas été rayé de la carte chez les jeunes du 21ème siècle
Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de jeunesse rebelle en Europe. D’autres jeunes plus radicaux s’organisent. Si au 19ème siècle, l’anarchisme était à son apogée dans les mouvements sociaux, il n’a pas été rayé de la carte chez les jeunes du 21ème siècle aspirant à un changement radical de société pour plus d’autogestion, de liberté, d’égalité et surtout une abolition des pouvoirs.
Ces jeunes rebelles dérangent beaucoup plus. Ils arrivent vraiment à emmerder les pouvoirs et autorités. Des modes d’actions se créent et se répandent comme les « black blocs », un mouvement d’activisme anarchiste né à Berlin-Ouest dans les années ’80 et depuis, à travers le monde : Amérique, France, Angleterre, Italie, Brésil, Egypte…
Les black blocs, ce n’est ni une organisation ni un groupuscule, c’est un mode d’action. Rentrer dans la manif, s’habiller en noir une fois dedans, être prêt à faire face aux forces de l’ordre, à se battre contre des symboles du capitalisme, créer un rapport de force.
Ces jeunes-là ne sont pas récupérables par des politiciens qui voudraient les utiliser pour porter leur parole tellement leur mode d’action est critiquée. Car les black blocs sont critiqués par les médias traditionnels, dans lesquels ils sont réduits au terme de « casseurs » et décrédibilisés en les faisant passer pour des personnes agissant sous le feu de pulsions rageuses. Cela délégitime complètement leur façon (réfléchie) d’agir qui vise à renverser l’ordre établi, à s’attaquer aux symboles du pouvoir, à utiliser éventuellement la violence, le tout en représailles à la violence des puissants. Cela délégitimise le fait que ce type d’action puisse s’inscrire dans la continuité d’une idée politique.
Les black blocs sont critiqués par des gens de tous horizons car la non-violence est le critère de crédibilité de notre époque. Ils sont une jeunesse rebelle. Ils ne sont pas les seuls.
D’autres mouvements optent eux pour la désobéissance civile, un mode d’action non-violent visant vraiment à désobéir et à être contraignant. Ici, le recours à la non-violence donne de la force aux mouvements en s’évitant une répression trop forte. Beaucoup de jeunes se retrouvent dans des mouvements ayant la désobéissance civile comme mode d’action.
En fait, une jeunesse rebelle existe en Europe. Pour arriver à ses fins, elle use de différents modes d’actions. En fonction du contexte, elle va opter pour tel ou tel mode d’action pour avoir des répercussions plus fortes. Cette jeunesse est bien organisée car elle a pu user des codes mis en place par les générations de rebelles précédentes, mais elle a tout intérêt à être bien organisée pour se battre contre les monstres qu’ils ont en face d’eux, ceux qui ont créé des inégalités sociales et des problèmes climatiques comme on n’en avait encore jamais vu.
Elie Scorier, chronique d’un ado ordinaire