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Rencontre & Réflexion

Portrait : Cécile Gouzée

  18 Sep , 2019   ,    COJ

Elle voulait être actrice, a étudié le journalisme et atterrira dans le secteur jeunesse ! Elle fut d'ailleurs Secrétaire générale de la COJ. Son dada : interconnecter les gens. Sa passion : la photographie.  Portrait d'une jeune retraitée en mouvement, qui nous rappelle parfois Agnès Varda. Style, gouaille et curiosité.

Cécile Gouzée, c’est d’abord une enfance tumultueuse sur fond d’Histoire.  « J’ai grandi au Congo, dit-elle. En 1960, il a fallu s’enfuir au milieu de la nuit, dans une pirogue. Mais j’avais 7 ans et me suis amusée comme une folle. ». Arrivée en Belgique, elle passe son adolescence entre les mouvements de jeunesse (scouts, SCI…) et les manifs. « Mes parents, de tradition protestante, étaient des tiers-mondistes convaincus. On manifestait contre la guerre du Vietnam, etc. ».

Sa scolarité terminée péniblement, la jeune fille est attirée par le métier d’actrice. Réponse du père : « Tu feras ce que tu veux mais d’abord, c’est l’université ! ». Par élimination, elle choisit « journalisme et communication sociale » à l’ULB. « Une fois diplômée, j’ai tenté de vivre du métier, en réalisant notamment quelques reportages photos, mais déjà à l’époque c’était complètement bouché ».

Cécile Gouzée va alors travailler à la Young Women Christian Association1 à Bruxelles. « Engagée comme responsable jeunesse, j’ai tout de suite été propulsée dans les responsabilités, ce qui m’a ouvert à la scène internationale. Mais au bout de cinq ans, j’avoue, j’en avais un peu marre des milieux féminins ».

Toutefois, représenter son association au Conseil de la Jeunesse lui avait beaucoup plu. Quand le poste de Secrétaire générale de la COJ s’est réouvert, elle a donc postulé. « C’était une période agitée à la COJ, il fallait se positionner entre les fédérations politiques, qui toutes avaient des relais auprès des ministres. On avait d’ailleurs décidé de s’appeler simplement ‘Confédération des Organisations de Jeunesse’. Aux autres de se définir ». C’est aussi l’époque de la professionnalisation du secteur, avec l’apparition du décret OJ  «un  tournant difficile avec désormais beaucoup de critères à respecter. ». Autres challenges : gérer les connivences peu transparentes de certains membres de la COJ avec d’autres fédérations ou encore décider/trancher s’il fallait fonctionner sans discipline de vote ou si – comme les autres fédérations – une force de frappe concertée était nécessaire pour exister ; et puis, il fallait calculer au moindre centime. « Après cinq ans, j’étais usée ».

Second souffle

C’est à la Fondation Roi Baudouin que Cécile Gouzée va trouver un nouveau souffle, engagée pour y lancer un programme jeunesse. Avec de belles rencontres : Jean-Jacques Jespers, Jean Blairon, …
« En une intervention de trois heures avec Jean Blairon, j’apprenais plus qu’en quatre années d’unif ! ». Sur le terrain, elle mettra notamment sur pied les premiers programmes de contact entre organisations de jeunesse des trois communautés, stupéfiée qu’on puisse faire des échanges avec le Pérou ou New York mais pas avec les jeunes de Gand.

Suite à une restructuration à la Fondation R.B., elle poursuit sa carrière comme coordinatrice de « eTwinning » pour la Belgique francophone. « Cette initiative de la Commission européenne promouvait, à l’aide des nouvelles technologies, les échanges entre classes (primaire et secondaire) de toute l’Europe. On interconnectait les profs les plus motivés pour travailler avec eux à la pédagogie du projet, utiliser l’informatique (souvent quasi inexistant), c’était une petite révolution ».

Aujourd’hui, retraitée depuis deux ans, Cécile Gouzée milite autrement, plus modérément. « J’ai fait une overdose d’associatif, pas dans les objectifs mais dans les méthodes. Donc je milite surtout via l’informatique, avec au moins une pétition par jour ! ». Et elle s’adonne à sa passion, la photo : « Maintenant je peux le faire à mon rythme, photographier ce que je veux, quand je veux ». Ce qui lui plaît dans le huitième art ? « Garder des traces et le hasard. Certaines photos prises à la volée dans la rue me tordent de rire quand je les vois à l’écran ! ». De temps en temps, quand elle en a assez de mitrailler avec son petit Lumix, elle se prête au jeu de la figuration. Mais en voyant le peu d’annonces pour des personnes plus âgées, celle qui a bossé toute sa vie pour les jeunes conclut : « Le jeunisme a frappé ! »….

Mathieu Midrez

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1. La Young Women’s Christian Association (YWCA) est un mouvement d’éducation permanente féministe, créé Royaume-Uni en 1855. Au fil du temps, l’organisation a développé des délégations dans le monde entier, avec de légères variations dans leurs programmes.  En Belgique, signale C. Gouzée, « elle n’était plus uniquement féminine, mais mixte, et plus du tout chrétienne.»