C'est à toi que j’adresse cette chronique… D’aussi loin que je m’en souvienne, tu as toujours été présente, à certains moments plus qu’à d’autres bien évidemment, mais toujours là, près de moi… Prête à agir quand cela te semblait nécessaire. Ensuite, et sans m’en rendre réellement compte, tu t’es mise à décider à ma place, à m’empêcher de faire ou dire des choses...
Petit à petit, je me suis vue en train de prendre la voie de ceux qui survivent et de m’éloigner de ceux qui vivent.
Mais qui es-tu pour réussir de cette façon à influencer mes décisions ? Toi, la Peur.
Je pense que tout le monde te connait, et pourtant tu te présentes différemment à chacun d’entre nous. Pour ma part, c’est une sorte de promesse faite entre nous : si je t’écoute, je ne souffrirai pas, je serai en sécurité et personne ne pourra me faire de mal.
Mais aujourd’hui, je me rends compte que les choix que je fais dans ma vie de tous les jours ne sont pas « garantis » sans souffrance, même si je t’écoute.
Tu ne peux, et tu le sais bien, rien me promettre, parce que d’une part, il y a mes peurs, celles qui m’appartiennent mais d’autre part, il y a aussi les peurs des autres, celles de mes proches, qui sont les leurs et qu’ils peuvent aussi, projeter sur moi, souvent parce qu’ils m’aiment (« ne fais pas ceci, tu vas tomber », « fais plutôt ça et tu seras bien vue ou heureuse »).
Là où je te donne raison, c’est que oui, la vie peut faire souffrir, pleurer, se sentir mal, seul, impuissant, … MAIS je ne crois plus, que de t’écouter pour faire mes choix y change, au final, quoi que ce soit ! Par exemple, personnellement, je choisis très souvent de ne pas exprimer ma vraie opinion sur les choses, à certaines personnes en particulier, de peur qu’ils me rejettent. Donc, je passe beaucoup de temps à ne pas être moi-même, sur tes « bons » conseils, alors que j’en souffre énormément ! J’en arrive finalement à souffrir « par peur de… ». Je ne me respecte pas et je m’en veux.
Alors aujourd’hui (même si cela prendra certainement du temps), c’est moi également qui décide de te dire au revoir.
J’ai donc décidé depuis peu, de sortir de cette zone d’inconfort et d’assumer qui je suis et ce que je pense au quotidien, parce que je préfère prendre le risque d’être rejetée pour qui je suis plutôt que pour quelqu’un que je ne suis pas !
Je suis plus que jamais convaincue que pour vivre une vie heureuse, enrichissante, remplie d’expériences qui me permettent d’évoluer, je dois prendre ce que tu appelles des risques et s’aventurer en terrain inconnu. Et tu sais quoi, Peur ? Depuis que j’ai pris conscience de cela, je constate que les choix que je fais « sans peur » sont toujours justes pour moi. Parfois le positif attendu n’est pas au rendez-vous mais j’avance en fonction de qui je suis. De quoi devrais-tu encore me protéger, si je fais MON choix, celui que me dicte mon cœur, ou mes tripes comme on dit ? L’envie de vivre devient, pour moi, plus forte que celle, illusoire, d’être en sécurité tout le temps. Je décide, dès maintenant, en fonction de qui je suis et plus en fonction de tes murmures à mon oreille. Salut !
Je terminerai par te dire que je ne t’en veux pas, ma peur. Ta place dans ma vie, je te l’ai donnée, je serais donc malhonnête de dire que tout est de ta faute, et même si je ne l’ai pas décidé de manière consciente, c’est moi, et moi seule qui t’ai laissé la prendre.
Alors aujourd’hui (même si cela prendra certainement du temps), c’est moi également qui décide de te dire au revoir.
Abigaïl Coster, chronique d’une ado ordinaire (COJ#28)