Avec la Rentrée scolaire, le COJ s’est penché sur la relation particulière que les OJ entretiennent (ou pas) avec le monde de l’enseignement formel. Quel temps ? Quelle forme? Quelle évolution? Pourquoi l’École? Tour de sonde de quelques OJ.
Certaines OJ développent une multitude de projets avec les écoles, d’autres pas, tandis que certaines se contentent de contacts réguliers, mais espacés. Les différences de pratique au sein des OJ de la CO J sont nombreuses. Nous avons essayé d’y répondre en prenant les situations particulières de certaines OJ sans avoir la prétention d’être exhaustifs quant à tous les projets proposés.
Chez JAVV A, on ne propose pas de collaboration directe avec les écoles. Pourquoi une présence au Tour des Ecoles alors? «Parce que les jeunes de 20 à 30 ans sont notre public cible» nous dit Roberta Stebel. «Au-delà de la publicité (non négligeable) que cela nous apporte, il nous paraît aussi important de développer avec les futurs enseignants des thèmes qui nous sont chers». En d’autres mots, il est important pour JAVVA qu’on entende parler d’eux, mais il est tout aussi important de former les personnes en charge des futurs citoyens aux thèmes de la citoyenneté active, de la rencontre interculturelle et du volontariat. Il s’agit pour eux de s’inscrire dans un processus d’éducation à long terme en se voyant partenaire et complémentaire plutôt que prestataire de service: «nous ne sommes pas là pour combler un manque, nous sommes des multiplicateurs, nous apportons de la valeur ajoutée de manière complémentaire au programme scolaire».
Au FIEJ, c’est l’histoire qui a créé les ponts avec le monde de l’enseignement formel. Suite au dernier festival organisé en 1996, le FIEJ a entamé sa reconversion vers différents projets basés sur l’art, car telle était sa sensibilité. Si les écoles ne sont pas un partenaire privilégié au départ, elles s’intéressent rapidement aux activités du FIEJ qui se félicite de ce rapprochement qu’il considère comme naturel. Pour Colette Forir: «Les OJ ont énormément à apporter à l’école. Il s’agit d’un lieu privilégié d’apprentissage à la citoyenneté. Nous avons les mêmes objectifs, mais avec des dynamiques différentes déclinées au travers de projets tels que ‘Mobilité’, ‘Quand le patrimoine s’emballe’ ou encore ‘la culture à de la classe’».
Au FIEJ, on transforme le projet en fonction de l’école, du public, de l’implantation. On parle de collaboration à long terme (une année scolaire), de réel partenariat, les écoles étant finalement aussi actives dans le projet que le FIEJ en lui-même.
Chez Spéléo-J on mise sur une forme de relation Win-Win. Pour Matthieu Nootens: «L’école manque drastiquement de concrétisation. C’est pourquoi nous proposons de coller un maximum au programme scolaire (essentiellement EDM et géographie) lors des excursions souterraines que nous menons».
L’école s’y retrouve, les étudiants sont preneurs de voir sur le terrain ce qu’ils apprennent théoriquement en classe. Et l’OJ continue sa mission d’éducation à l’environnement, au respect de la nature.
Chez Loupiote, parmi la multitude de projets proposés aux écoles, le point commun est de le faire au travers de l’outil particulier du cinéma, un média que les écoles n’ont pas particulièrement l’habitude d’utiliser. Ici, nous sommes dans l’utilisation et la production d’outils particuliers. Le projet «No hate speech movement» a permis la création d’un outil pédagogique reprenant un DVD avec un court métrage («Ce qui vous regarde»), des interviews et un livret pédagogique, le tout disponible au Salon de l’éducation 2014. Fort d’une expertise, l’objectif est de fournir au monde de l’éducation (enseignants, éducateurs…) un outil original pour une meilleure compréhension des mécanismes du discours de haine en ligne en proposant des pistes de réflexions et d’actions concrètes.
Chez EGD, on s’est donné comme objectif l’éducation à la paix. Les «Classes de paix», projet à long terme proposé aux classes de 3ème maternelle jusqu’en 6ème primaire permet de rencontrer des enfants et des enseignants en grand nombre. Finalement, l’école est ici un vecteur de rencontre qui permet encore une fois cette éducation à la citoyenneté.
Le rapport à l’argent reste une question cruciale. Les subsides ne suffisent pas. Si au FIEJ on construit le partenariat au point d’inclure les écoles dans les demandes de subsides en fonction des projets, on reconnaît que ceux-ci permettent un nombre limité d’activités. «Des projets comme ‘Quand le patrimoine s’emballe’ coûte en moyenne 25.000 euros incluant la production d’une bâche, il faut comprendre qu’on ne peut multiplier ce projet à l’envi» précise Colette Forir.
Chez Spéléo-J, une contribution financière est demandée pour certaines activités (d’autres sont gratuites), car la réalité financière est toujours présente. «Nous sommes une OJ, mais nous nous devons d’assurer un encadrement professionnel et sécuritaire. Du personnel d’encadrement et du matériel ont un coût». Les interventions demandées ne suffisent cependant pas à couvrir une activité et il leur arrive aussi d’accorder des déductions ou des facilités. C’est donc la course aux subsides…
Pour EGD, la question était encore plus cruciale avant de recevoir une reconnaissance comme Organisation de Jeunesse. En tant que Groupement, l’intervention demandée n’était largement pas suffisante pour couvrir les frais impliquant l’intervention d’un formateur dans une «classe de paix».
Aujourd’hui, la reconnaissance change légèrement la donne, sans couvrir les besoins, et une réflexion est lancée sur cet aspect financier.
Les OJ consultées sont unanimes, elles considèrent que les relations avec les écoles ont tendance à s’orienter vers de réels partenariats ne se limitant plus à une offre de service. Les limitations dues aux moyens (des OJ comme de l’école) restent une frustration pour la plupart d’entre elles, les empêchant de développer de nouveaux projets ou de pérenniser des projets existants.
Les écoles, elles, sont de plus en plus conscientes du potentiel des OJ. Finalement, des initiatives fédératrices comme le «Tour des Écoles» gardent tout leur sens. Son développement 2014 en partenariat avec une deuxième haute école (la Haute École Condorcet après la Haute École Francisco Ferrer) n’en est qu’une preuve supplémentaire…
«On crée des potagers pédagogiques avec les enfants dans leur école. Ce qui nous permet d’aborder avec eux différents thèmes comme par exemple le gaspillage alimentaire… Un projet associatif au sein des écoles dépend souvent de la motivation du professeur ou de la direction. Ici, c’est un projet dans l’air du temps avec un côté «ludique». De plus, la «logistique» est légère (3-4 bacs suffisent) et le potager est un projet concret, les mains dans la terre. Les profs y participent volontiers. Bref, on trouve tous les ingrédients d’une animation efficace»
«A l’exception de séances de sensibilisation à la surdité dans des écoles pour ‘entendants’, le CREE se concentre dans les écoles spécialisées pour les sourds. On amène notre expertise et on aborde en langue des signes (avec des outils visuels) des thématiques variées établies avec les directions et le corps enseignant. La spécificité est le partenariat sourd/entendant. Les professionnels sourds sont encore très peu présents dans les écoles pour sourds. Rencontrer un animateur sourd signant offre un moment de respiration pour ces jeunes. Nous utilisons aussi des outils dont les écoles ne disposent pas ou très peu ou qui sont moins pertinents dans un contexte scolaire : par ex. les élèves peuvent s’exprimer en langue des signes devant une caméra. C’est l’animation mais au sens noble! D’années en années, nous retrouvons les mêmes élèves. Cela n’a rien d’un ‘One shot’».
«On travaille de plus en plus par «gros programmes»: Graines de médiateurs, Médiation entre jeunes, Prévention au harcèlement… Il s’agit de former les adultes sur le terrain, que le projet puisse continuer à vivre sans nous. Parfois, nous sommes appelés en «pompiers» à cause de problèmes graves et du coup des attentes sur nos actions sont énormes. Animation ? Oui, nous proposons des animations pour «simplement» faire du lien dans les classes, où l’on «casse» un peu les routines journalières. Comme après un bon cours de gym, il arrive que les élèves et les enseignants soient revigorés».
«Nous sommes nées dans les écoles et nous gardons ce lien même si nos méthodes se sont différenciées de l’«éducation formelle» que nous apportons aux enseignants des outils d’éducation non-formelle. De notre projet «célèbre» Echec à l’échec, nous nous occupons des aspects administratifs et organisationnels mais pas du pédagogique. Ce programme d’ateliers de remédiation scolaire se déroule un peu partout en Communauté française, l’idée est de proposer ces ateliers à très bas prix (en comparaison avec l’offre privée) de manière à être le plus accessible. Il ne s’agit pas d’une collaboration mais bien d’un contrat de location pour occupation, comme pour une activité de centre de vacances, par exemple…»
«Nous remplaçons les professeurs dans les écoles qui font appel à nos services (durée variable 1, 2, 3 jrs ou semaine complète). Nous mettons à disposition le kit complet, classe verte, remplacement, journée pédagogique, mercredis après-midis, étude encadrée et ateliers à thèmes le soir, projet durable enseignement-culture. Nous commençons toujours par les remplacements et nous amplifions les collaborations si nos projets pédagogiques concordent et si nos équipes pédagogiques sont intéressées. Les thèmes proposées peuvent être scientifiques, artistiques (théâtre, arts plastiques), sportifs, culturels ou philosophiques… Le bouche à oreille fonctionne bien, nous sommes overbookés déjà pour cette année scolaire. Nous sommes perçus comme des aides qualifiées en plus».
«Sensibiliser un maximum d’enfants/ jeunes à des thématiques telles que le don de sang, les gestes de premiers secours, la prévention des dangers dans la maison… est essentiel. C’est donc indispensable d’aller en milieu scolaire. De plus, nous formons aussi les acteurs de l’éducation pour qu’ils deviennent des acteurs-relais. Les profs sont très heureux de pouvoir faire découvrir à leurs élèves des thématiques qu’ils ne maîtrisent pas forcément. On fait de l’animation qui apporte une matière de qualité enrichissante et ludique à la fois dans laquelle les jeunes sont des acteurs clé. Ces «animations» prennent tout leur sens».