Nos têtes blondes ont repris le chemin de l’école. « Têtes Blondes », l’expression est-elle adéquate à l’école d'aujourd'hui, multicolore et métissée ? Time4Diversity aborde en classe des sujets comme les Préjugés, l’exclusion sociale, la discrimination, l’esprit critique… Un Projet européen auquel A participÉ notre organisation de jeunesse, JaVVa.
En 2009, l’ONG autrichienne Grenzenlos lance des animations dans les écoles pour discuter avec les jeunes des stéréotypes et préjugés à l’aide de méthodes de l’éducation non-formelle. Le but : encourager le respect des diversités culturelles et sociales. Forte des retours positifs de plusieurs écoles, l’ONG décide de partager son expérience avec d’autres associations à travers l’Europe et ainsi de tester ces animations avec des élèves de pays différents. Le partenariat, financé par le programme Erasmus+ de l’Union européenne, se conclut en 2015 avec des associations en Estonie, Allemagne, Belgique et Italie, et prend le nom Time4Diversity.
Certes, ils ne sont pas les premiers à faire des animations basées sur l’éducation non-formelle dans les écoles ou à aborder la diversité culturelle. Alors quelle est la nouveauté ici ? Principalement la dimension transnationale du projet. Une même animation va être donnée dans des contextes culturels et sociaux très variables, d’une école secondaire en Allemagne à un centre de jeunes du sud de l’Italie. Exemple d’une animation Time4Diversity qui se base sur le principe du téléphone sans fil : les élèves se répètent tour à tour un texte. En cours de route, le contenu est involontairement modifié, des éléments disparaissent, etc. Cela permet de sensibiliser à l’esprit critique à avoir lorsqu’on lit la presse par exemple. Les mêmes déformations, celles de l’information erronée, détournée, transformée, etc. peuvent avoir lieu. Cette animation fonctionnera donc partout, dans les pays partenaires, mais devra être adaptée en fonction du lieu et du public.
Autre exemple d’animation avec le thème de la migration. Dans Un pas en avant, chaque participant reçoit une description de son personnage. Par exemple : « Je suis un vieux fermier, j’ai toujours habité ce village et mes fins de mois sont difficiles » ou « Je suis une mère célibataire avec deux enfants, sans famille dans la région ». L’animateur va au fur et à mesure donner l’état dans lequel se trouve le pays, état qui se détériore de plus en plus (« il y a quelques affrontements à l’extrémité du pays », « les violences ont atteint la région, l’école a été fermée »). Après chaque situation, les participants peuvent décider s’ils restent, quittent la région ou fuient le pays. Les participants se rendent ainsi compte que les décisions dépendent de nombreux facteurs et sont très subjectives.
Naturellement, ce projet européen varie selon les contextes. Ainsi, les animations sur la migration ne seront pas données pareillement en Allemagne ou en Estonie où seulement quinze Syriens ont fait une demande d’asile en 2015 ! Les animateurs des différents pays ont donc pu comparer leurs expériences (plusieurs évènements communs ont eu lieu depuis le lancement du projet), se donner des conseils et affiner encore les animations.
Une des forces de Time4Diversity vient de l’enrichissement mutuel entre les partenaires et leurs expériences. Formés à la base par l’équipe de l’ONG Grenzenlos aux techniques qu’ils utilisent depuis 2009, les quatre partenaires ont pu apporter leur pierre à l’édifice en introduisant de nouvelles animations. Six mois après le lancement, tous se sont retrouvés pour rédiger ensemble un document reprenant d’une part une description du projet et de ce qu’est l’éducation non-formelle (le volet théorique) et d’autre part des fiches synthétisant chaque animation, avec la durée, le but recherché, l’âge requis, etc. (le volet pratique).
L’idée est de positionner ce livret comme un « ambassadeur du projet » pour qu’ensuite d’autres associations, professeurs… non partenaires du projet puissent s’inspirer et utiliser les animations qui les intéressent. Un effet multiplicateur en quelque sorte de Time4Diversity.
Cette volonté de multiplier l’impact du projet transparaît également dans le grand nombre d’animations réalisées (près de 100 animations en une année pour un total de plus de 1500 participants) et dans la diversité des publics : élèves du secondaire principalement mais également volontaires, instituteurs, étudiants universitaires, maisons de jeunes, etc.
En ces temps où les pays ont tendance à vouloir se recroqueviller sur eux-mêmes, Time4Diversity montre avec succès qu’une ouverture au-delà de ses frontières permet d’aborder des thématiques communes en profitant de l’expérience des uns et des autres.
En août dernier, à Bruxelles, le livret contenant toutes ces informations a été présenté au public. Il est disponible sur la page facebook « Conference Time4Diversity ».
Partenaire du projet, l’organisation de jeunesse JAVVA a formé plusieurs personnes aux outils de l’ONG Grenzenlos mais a aussi pu profiter de sa propre expertise sur les migrations pour aller au-delà de thèmes relativement généraux comme les stéréotypes ou la diversité. La migration est l’un des enjeux de société dominant de ces dernières années en Belgique et en Europe : crise des migrants, « asile » de fortune au Parc Maximilien, sorties récurrentes dans la presse de Theo Francken (N-VA), le secrétaire d’État à l’Asile et aux Migrations (sur l’augmentation des places en centre fermé, sur le vote des étrangers aux régionales, etc.) D’où la volonté de JAVVA d’introduire des animations sur cette thématique spécifique dans les écoles, en lien avec les cours de sciences sociales, de morale… passant d’une école populaire d’Anderlecht au lycée huppé avec élèves en costumes cravates ! Le vrai plus de ces interventions auprès des élèves vient du fait que les animations de JAVVA font participer leurs volontaires européens qui partagent ici leur expérience des centres d’accueil dans lesquels ils travaillent. JAVVA en accueille depuis plusieurs années pour des périodes de 6 à 12 mois. Les volontaires font d’ailleurs visiter à certaines classes les centres d’accueil et d’orientation, et au vu des feedbacks des élèves, ce contact avec les réfugiés modifie bien souvent l’image qu’ils en ont.
Nous faisons partie d’un réseau, Alliance Network, où l’échange de bonnes pratiques se fait régulièrement. L’ONG Grenzenlos a proposé ce projet qui nous a intéressé. Cela fait plusieurs années que nous voulions mettre en place des activités dans les écoles autour de ces thématiques. C’était plus facile de se lancer avec un cadre que nous offrait l’ONG autrichienne.
Les membres des associations partenaires et les volontaires européens bien sûr mais aussi les (jeunes) profs à la recherche de méthodes alternatives, des représentants institutionnels, des bénévoles. Des formateurs de l’armée étaient également présents à la présentation du livret !
Les ateliers vont continuer jusque mars et l’ONG Grenzenlos va déposer un projet afin d’avoir des fonds pour l’élargir à d’autres associations. Le projet pilote a été très convaincant, nous avons désormais un livret reprenant les animations, l’idée est donc de le disséminer. De notre côté, nous comptons faire de ces animations dans les écoles une activité structurelle de JAVVA, avec encore de nouvelles thématiques (engagement citoyen, inégalités, etc.).