Sénatrice et Députée bruxelloise, Simone Susskind - sioniste de gauche et juive laïque - est, margré tout, une inlassable activiste de la paix Israëlo-Palestinienne (mais pas que), notamment auprès des jeunes bruxellois (mais pas que).
La petite septantaine, le pas dynamique, le regard vif, la voix passionnée, Simone Susskind a l’accueil chaleureux. Sur le feu, son projet Israël-Palestine : pour mieux se comprendre. « L’idée est de sensibiliser les lycéens bruxellois à la complexité de ce conflit. Après des cours d’histoire sur le Moyen-Orient, des sorties cinéma, etc., ils entament un voyage d’une semaine à la rencontre des jeunes en Israël et en Palestine. On en tire un film puis certains deviendront des ambassadeurs dans nos écoles ».
Connue sur la place publique, en duo avec son mari, feu David Susskind, Simone Weinberg est née en 1947 à Bruxelles. Dès les années soixante, à l’université, elle s’implique à résoudre le conflit israélo-palestinien, puis aux côtés de son mari, fondateur du Centre communautaire laïc juif (CCLJ) dont elle fut la présidente de 1985 à 1995. « Avec David, on n’était d’accord sur ‘Seul le ciel est notre limite’. Mon engagement démarre à l’ULB où j’étudiais les sciences sociales, où j’étais active dans une association progressiste d’étudiants juifs. Là, j’ai pris conscience de la Palestine par le biais, en 1968, de l’étudiant-leader qu’était Mony Elkaïm (célèbre psychiatre du mouvement antipsychiatrie). Après mes études, je rejoins le CCLJ. Au sein de la communauté juive, nous étions haïs mais aussi soutenus pour nos positions. Dès le début, j’étais pour un état palestinien à côté d’un état israélien. Nous étions une minorité pionnière car nous avions compris qu’il y avait une aspiration à l’autodétermination d’un peuple ».
Sioniste de gauche et juive laïque, dès ses 14 ans, en cachette de ses parents, Simone Susskind rejoint un mouvement de jeunesse juive sioniste, part en Israël, s’essaie au kibboutz. D’où vient ce moteur frondeur ? « Mes parents ont perdu leurs familles dans la Shoa. De ce traumatisme, mon père voulait qu’on oublie que nous étions juifs. Pour lui, le monde extérieur était menaçant. Je me suis construite contre ce repli ! Pour moi, on pouvait changer le monde ».
De ce moteur indéfectible pour la paix, elle a réussi, avec David et le CCLJ, des projets impensables. Lors de la première Intifada, en 1988, avec Give Peace a Chance : première rencontre internationale publique entre Palestiniens et Israéliens. Un an plus tard, en 1989, une deuxième rencontre israélo-palestinienne entre des femmes des deux peuples. Simone Susskind sera appelée ensuite pour organiser des dialogues du genre pour la Yougoslavie et Chypre ainsi qu’entre des femmes méditerranéennes et des femmes politiques européennes, bien avant l’Euromed. Peu à peu, du célèbre couple d’activistes « Les Susskind », elle prend son envol. « J’ai pris mon indépendance en 1991 où j’ai été consacrée « femme de l’année » par des journalistes. Concession inconsciente, j’ai gardé le nom ’Susskind’, plus simple à dire que ‘Weinberg’ ».
En 2012, c’est bien Simone Weinberg qui devient baronne au Royaume de Belgique signalant au palais « qu’il était temps de nommer « baronne » des femmes musulmanes ». Lorsqu’elle devient « Docteure Honoris Causa » de l’ULB en 2000, elle épingle dans son discours, le peu de femmes au palmarès. « Mon féminisme date des années 70 lorsque nous avons organisé une réflexion sur le féminisme juif. Une prise de conscience pour beaucoup de femmes. Dans l’activisme, les hommes étaient les chefs, les femmes des assistantes ou des accompagnatrices. »… Vient ensuite la politique au sein du Parti socialiste, à l’appel d’élio Di Rupo sur les listes européennes, puis de Laurette Onkelinx qui lui conseille le Parlement bruxellois. « Elle y voyait une base à mes engagements. En effet, ce projet Israël-Palestine avec des lycéens est avant tout un projet bruxellois. Je m’occupe d’Israël-Palestine mais en fait, je m’occupe de ce qui me dérange là où je peux faire quelque chose. » Prochaine action : une grande conférence à l’ULB sur la situation en Turquie, en avril.
De cette vie d’activiste, des questions périphériques. Une anecdote ?… « La visite d’Arafat en Belgique. Une cérémonie est organisée par l’ambassadeur du Maroc. Les chaînes de télévision sont là. Dans la file pour aller le saluer, mon mari me dit : ‘Surtout ne le laisse pas t’embrasser. Ça passera mal dans la communauté’. Arrivée près d’Arafat, il me sert la main puis, on lui présente David Susskind et là Arafat se jette dans ses bras ! » (rires). Ce qui la rend heureuse ? « Mes 2 enfants et mes 5 petits-enfants ». Loisir ? : « Je joue du piano et de l’accordéon ». Le désespoir de l’activiste ? « Jamais. Je suis une optimiste désespérée ».